Les Halles de Schaerbeek
— Brussels —

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ARTICLE | Bloc Culture face au gouvernement Arizona et témoignage

 

Une journée d'action de défense des droits des travailleur·euses a lieu ce jeudi en réaction aux mesures du nouveau gouvernement Arizona. Les Halles sont solidaires de ce mouvement et ses portes seront fermées de 10h30 à 12h30.

Une manifestation débutera à 10h30 à la gare du Nord.

 

Nous profitons de cet évènement pour publier un texte de Lou Van Egmond, régisseurXeuse lumière et générale et créateurXice lumière, qui témoigne des conditions de travail souvent difficiles des technicien·nes.

Ce message ne souhaite en aucun cas blesser, ou viser qui que ce soit. Il s'agit là d'un état d'âme que j'avais besoin d'exprimer, fort.

Cette semaine, j'ai encore dis aurevoir à un ami, un collègue de travail, un repère.

Cette année c'est le premier, mais l'année dernière 3 de mes amis sont morts.

Mes ami.e.s, à moi, sont plutôt ceux de l'ombre. En coulisse ou en régie tapis dans le noir, petzel vissée sur le front en mode rouge, intercom sur les oreilles, tous.tes vêtus de noir (et c'est peut être l'image la plus glamour de nous).

Bien que sans nous, il n'y a pas de lumière, pas de plateau, pas de son, pas de magie, pas de jolies décors, pas de costumes, pas d'images, pas d'esthétique, pas de technique, pas de théâtre.

Et bizarrement ce sont mes amis qui disparaissent comme une extinction de masse.

Depuis 4 ans, j'ai perdu au moins 7 de mes ami.e.s.

Je dis ami.e.s, mais je pourrais aussi dire famille.

On se connait toustes, on travail jour et nuit ensemble.

Au delà des décès, dans mon entourage je ne connais pas UN.E seul.e de mes ami.e.s qui ne soit en burn out où l'ai été aux cours des dernières années. Je n'arrive pas à citer le nom d'un.e seul.e de mes ami.e.s qui ne trouvent pas que notre travail soit intense et ne se soit pas senti submergé, envahi, envie de craquer au moins une fois par la pression. Bizarre, c'est que du travail nan ?

Pas aussi bizzarre vu nos horaires 9-22h enfermés dans une boîte noire et la gueule de nos salaires !

Alors oui, l'extinction de masse elle ne se fait pas qu'à l'intérieur d'une boîte noire. Disons quand même, que ça laisse peu de temps pour essayer d'attraper un rayon de soleil et de rendez-vous avec ses proches, et son psy.

A notre stade c'est plus rapide de boire une bière ou deux ou 10 de fin de journée et/ou de se taper une ligne pour tenir ou lâcher un peu la pression. Et il faut avoir une sacrée niaque pour sortir de ce schéma-là.

Imaginez une création d'un spectacle.

Imaginez que nous sommes là pour que ça existe faire en sorte que tout fonctionne, que les images puissent exister, que les timings soient respectés, que les décors soient construits, que les projecteurs soient installés en temps et en heure, que les budget soient tenus.

Imaginez ensuite qu'à ça s'ajoute le côté humain, les frustrations, les angoissent, les ras-le-bol, la pression, les envies folles, les désirs techniques impossibles.

Nous sommes à votre service. Et je pense sincèrement que nous aimons être à cet endroit. Aux services des théâtres, aux services des metteur.euse.s en scène qui doivent raconter leur monde, aux services des createur,ices en travaillant main dans la main, aux services des délais, aux services du budget.

Pour ma part, je ne le fais pas depuis si longtemps ce joli métier. En attendant, c'est mon métier, je l'aime, je le chéris et je suis fièr.e d'en faire parti.e.

Malheureusement, je commence à avoir très très peur pour la suite.

Si ça continue comme ça il ne nous restera que nos mots.